PRÉSENTATION
Créé en 1989, par le philosophe et professeur d'esthétique théâtrale, Michel Bernard, le département Danse de Paris 8 fut ouvert avec l'ambition de créer un lieu expérimental de réflexion, de pratiques et d'échanges en danse en écho au développement exponentiel de la danse contemporaine en France dans les années quatre vingt.

Il s'inscrit en cela directement à la suite des efforts soutenus et conjoints d'un noyau d'universitaires - Michel Bernard, Robert Crang et Simone Clamens (ces deux derniers venus de l'Education Physique et Sportive de l'Université de Nice) - qui ont permis à la fois la création en France du premier poste de Maître de Conférences en danse en 1984 à Nice (sur lequel fut nommée Francine Lancelot, seule danseuse-chorégraphe alors dotée d'un doctorat) et l'existence, au sein des études en arts, d'une Licence nationale en Danse. Avec 150 étudiants environ chaque année (de tous âges et nationalités, issus de formations très différentes, danse classique, jazz, danse traditionnelle, hip-hop, cirque), 6 postes de titulaires et de nombreux chargés de cours professionnels en danse, le département Danse participe aujourd'hui pleinement de la seule UFR (Unité de Formation et de Recherche) en France qui rassemble la philosophie et les différents arts - Arts Plastiques, Cinéma, Danse, Musique, Multimédias, Photographie, Théâtre -, et qui, dès leur création, ont associé la pratique à la théorie.

Il a d'abord proposé un DU (Diplôme Universitaire) puis a délivré les diplômes de Licence, Maîtrise, DEA (aujourd'hui Master) et accueille des doctorants au sein de son équipe de recherche.
Trois moments
Depuis sa création, trois approches du travail de la danse se sont tissées, correspondant à divers moments et dynamiques de son histoire :
- le premier moment (porté par la recherche de Michel Bernard, professeur de 1989 à 1992) fut centré sur une approche philosophique de la corporéité en danse ainsi que des sources, matériaux et mécanismes de l'écriture chorégraphique et de sa perception. Ces interrogations philosophiques continuent d'irriguer la recherche sur les conditions de possibilités et les cadres de l'expérience en danse.

- Portée par cet élan, la seconde approche fut recentrée (par les recherches d'Hubert Godard, danseur et chercheur sur le mouvement, nommé Maitre de Conférences en 1991) sur le travail propre du danseur, sur les conditions de son expressivité, ses modes d'entraînement et ses modes d'interprétations à partir de l'analyse de son geste. Elle se poursuit aujourd'hui dans le travail de Christine Roquet et se développe à travers un focus sur des techniques du corps : pratiques de danse et champ des pratiques dites « somatiques » voisines du champ de la danse. La pertinence de ces dernières et les conditions de leur présence aujourd'hui en danse, mais plus largement dans le monde du soin, sont au centre, entre autres, d'une approche tournée vers la recherche-action au sein du corps social. Cette perspective a donné lieu à la création d'un Diplôme d'Université « Techniques du corps et monde du soin » en 2009, dirigé par Isabelle Ginot.

- La troisième approche s'interroge quant Ă  elle sur l'analyse des œuvres chorĂ©graphiques, les cadres tout Ă  la fois historiques, esthĂ©tiques et culturels qui organisent les discours et l'analyse des œuvres autant que la production d'une « histoire de la danse ». Cet intĂ©rĂŞt a rassemblĂ© l'ensemble des enseignants-chercheurs depuis quinze ans, il est davantage aujourd'hui portĂ© par Isabelle Launay, Sylviane Pagès et Julie Perrin. Il est marquĂ© par une rĂ©flexion sur le terrain (enquĂŞte de terrain) et par la mise en jeu de dispositifs d'observation des œuvres chorĂ©graphiques.

Un département expérimental
Ce département s'est constitué depuis sa création comme réponse aux besoins du milieu professionnel en France d'espaces réflexifs et critiques, et ce dans la tradition de l'Université de Vincennes à Saint-Denis. Ses enseignements et orientations de recherche se sont modifiés depuis vingt ans au fur et à mesure des nécessités perçues. Il s'est fixé trois objectifs :
1. Développer, sous des modalités diverses, un espace de réflexion critique et d'échanges entre création, pédagogie et recherche
2. S'initier et s'engager dans la recherche
3. Développer des collaborations extérieures
Développer un espace de réflexion critique et d'échanges entre création, pédagogie et recherche
En s'attachant Ă  l'expĂ©rience artistique et technique, au travail qu'elle suppose, Ă  la perception des actes et des œuvres dans un contexte donnĂ©, le dĂ©partement privilĂ©gie les liens entre recherche et pratiques contemporaines en danse. En d'autres termes, un travail d'atelier appelle une rĂ©flexion spĂ©cifique et une analyse thĂ©orique s'appuie sur l'expĂ©rience de pratiques prĂ©cises. Si le champ contemporain fait rĂ©fĂ©rence, le dĂ©partement n'entend pas privilĂ©gier un style ou une esthĂ©tique prĂ©cis ; les interprètes, pĂ©dagogues ou chorĂ©graphes qui dirigent les ateliers sont invitĂ©s en fonction d'un projet le plus souvent reliĂ© aux enseignements thĂ©oriques.
Par exemple, ces dernières années, Isabelle Marteau a mené des ateliers et des cours pour traiter de l' « event » chez Cunningham et Cage en collaboration avec une approche historique et esthétique. Simon Hecquet a introduit une approche critique des systèmes de transcription du mouvement, en prenant pour appui la partition de « L'Après midi d'un faune » de Nijinski ; Anne-Karine Lescop a dirigé une série d'ateliers autour de la reprise et réinterprétation d'un solo filmé ; Cécile Proust, autour des performances féministes ; Julie Nioche, autour de l'image du corps ; Anne Collod sur la relecture de « Parades and changes » d'Anna Halprin, Fabienne Compet sur « Trio A » d'Yvonne Rainer; Loïc Touzé a développé un travail d'atelier sur la notion de masse, ainsi que sur sa pièce « Love ». Laetitia Doat a travaillé sur le répertoire d'Isadora Duncan, de Doris Humphrey et de Ruth Saint Denis ou enfin Boris Charmatz et Anne Karine Lescop ont produit avec les étudiants une forme d'event « All Cunningham ». Fabrice Ramalingom a mené un travail sur sa pièce « Postural », en collaboration avec Christine Roquet sur la notion de posture. Jennifer Lacey a partagé sa démarche de création, en articulation avec le cours d'histoire de la danse américaine de Julie Perrin et celui sur les gestes et textes somatiques d'Isabelle Ginot, etc. Il ne s'agit pas ici de tenter de « présenter un éventail » de techniques, d'approches compositionnelles, etc., mais d'explorer une problématique artistique spécifique. Dans le même sens, Julie Perrin développe depuis plusieurs années des ateliers sur les spatialités en danse aussi bien en collaboration avec des architectes qu'avec des chorégraphes travaillant sur l'in situ (Gabriel Hernandez, Christophe Haleb, Laurent Pichaud, Mathias Poisson...).

Cette immersion dans la pratique, fût-elle de courte durée, permet de faire émerger un travail théorique qui ne s'aligne pas sur ce qu'il est convenu de dire à peu de frais de l'expérience artistique, ou qui se contenterait d'appliquer un savoir théorique qui n'aurait été mis à l'épreuve des spécificités de cet art. Il s'agit avant tout d'inviter les danseurs à tirer profit du recul ou de la problématisation que permet le cadre universitaire et d'accompagner ou stimuler l'interrogation continue des artistes, des pédagogues et des autres chercheurs en danse sur l'évolution des pratiques chorégraphiques.
Développer des collaborations extérieures
Depuis sa création, le département Danse a toujours travaillé en étroite collaboration avec d'autres associations, structures et instituts nationaux et internationaux de danse, comme, par exemple :
- Le département Danse de l'Université du Québec à Montréal
- Le département Danse de l'Université de Nice
- Les universités de Todai (Tokyo) et de la PUC (Sao Paulo)
- Le Centre national de la Danse
- Le Centre national de danse contemporaine d'Angers
- Les Centres Chorégraphiques nationaux d'Angers, Caen, Montpellier et Rennes.
- Les Laboratoires d'Aubervilliers
- Les Rencontres Chorégraphiques Internationales de Seine-Saint-Denis
- Le Théâtre national de Chaillot
- Le Théâtre de la Ville
- Le Théâtre de la Cité Internationale
- L'association AIME

S'engager dans la recherche
Partant du terrain pour y retourner, l'ensemble des dĂ©marches entreprises a pour enjeu l'Ă©laboration, Ă  long terme, d'outils propres au champ de l'analyse du mouvement dansĂ©, de l'analyse des œuvres, de leur critique, et de leur histoire, comme au champ de la pĂ©dagogie en danse. En ce sens, le dĂ©partement ne propose pas une simple vulgarisation didactique : il exige des Ă©tudiants un engagement personnel important. Outre un effort de lecture et de rĂ©flexion, les Ă©tudiants doivent aussi assister rĂ©gulièrement aux programmations de danse proposĂ©es dans les divers théâtres de Paris et sa banlieue. Les enseignements ne sont pas similaires Ă  ceux d'une Ă©cole de danse qui dĂ©livre une formation technique d'interprète ou de chorĂ©graphe, et ils ne sont pas exclusif d'un travail complĂ©mentaire de perfectionnement technique en danse dans des cours ou ateliers pris Ă  l'extĂ©rieur.
Le public Ă©tudiant
Outre les pré-requis de formation antérieure exigés (pratique en danse et formation générale de base), le département Danse s'adresse à des étudiants ayant un intérêt clairement défini : certains d'entre eux sont déjà des pédagogues, interprètes, chorégraphes, ou critiques de danse qui cherchent à élargir leur champ d'action, ou à prendre du recul vis-à-vis de leur propre pratique. D'autres, plus jeunes, pour lesquels le programme du département Danse constitue une formation initiale, doivent savoir que le programme leur offrira une culture chorégraphique large, mais qu'il ne leur offrira pas les acquis techniques nécessaires à de nombreuses professions (techniques de danse, administration et gestion, communication, etc.). Depuis la rentrée 2009-2010, des conventions avec deux Ecoles Nationales Supérieures: le Conservatoire national supérieur de musique et danse de Paris (CNSMDP) et l'Ecole supérieure du Centre national de danse contemporaine d'Angers (CNDC) permettent aux étudiants de ces deux écoles d'obtenir l'équivalence des deux premières années d'université et de compléter ainsi leur formation chorégraphique et générale en entrant directement en Licence 3.