Danser au temps de la révolution d'Octobre. Les studios d'Inna Tchernetskaïa, de Ludmila Alexeïeva et de Kassian Goleïzovski (1917-1928)
Thèse de doctorat en Esthétique, sciences et technologies des arts, spécialité : danse, soutenue en 2023 à l'Université Paris 8 Sous la direction d'Isabelle Launay
Cette recherche met en lumière les pratiques chorégraphiques des protagonistes largement méconnus de la « nouvelle danse » russe qui a connu un essor suite à la révolution d'Octobre 1917. L'étude porte sur trois cellules de recherche chorégraphique : le studio de danse moderne « synthétique » d'Inna Tchernetskaïa, le studio de gymnastique harmonique de Ludmila Alexeïeva et le studio de nouvelle danse classique de Kassian Goleïzovski, appelé également le Ballet de Chambre de Moscou. En se revendiquant comme des « laboratoires » du mouvement, ces studios proposent des regards critiques sur la réitération de gestes-clichés dans la création chorégraphique ainsi que les moyens d'y remédier. En même temps, les visions qu'ils défendent ne sont pas sans susciter des tensions avec la direction idéologique prise par le nouveau pouvoir bolchévique. Ces pratiques s'accommodent mal aux nouvelles normes esthético-idéologiques ; au contraire, elles résistent, consciemment ou inconsciemment, à une « soviétisation » de la danse imposée d'en haut. Ainsi, durant les années 1920, elles sont progressivement marginalisées par le régime et transformées en « fantômes » de l'histoire soviétique. En retraçant le parcours de ces studios dans la première décennie après la révolution d'Octobre, nous cherchons à élucider leur double fonction critique : artistique - à travers une émancipation des codes esthétiques existants, et politique - à travers une résistance, ne serait-ce que souterraine, à certains dogmes idéologiques du pouvoir soviétique.